LE SANCTUAIRE D'ETTY MACAIRE 2

LE SANCTUAIRE D'ETTY MACAIRE 2

« Les chroniques afro-sarcastiques : 50 ans d’ indépendance, tu parles ! » : les larmes d’une indépendance truquée !

Il serait bien maladroit de présenter Venance Konan dans cette bribe de kevlars. Ce journaliste émérite, qui en une année « est passé de » simple écrivain (et journaliste) à Directeur Général du plus grand quotidien ivoirien Fraternité Matin, puis au soleil levant, est devenu grand prix littéraire, « qui dit mieux ? » Ô que « nous avions dansé » ! Même ceux qui crient toujours au vol de la fontaine ! Et on n’a pas encore arrêté de chanter et de danser ! La fête est belle ! Le monde des Lettres tient une reconnaissance inestimable, non à l’homme qui a toujours soutenu et s’est opposé le lendemain, mais à l’écrivain cinq galons, doublé d’ironies, d’humour parfois acerbe, de dérision et d’un talent consommé. 

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Ô qu’il « parle » ce Venance ! Il pointe toujours l’épée où ça fait mal. Il tord de douleur tout esprit, en renvoyant subitement sur un tableau clair le Noir et le Blanc, le Jaune et même le Rouge, les tout-puissants qui demandent davantage de caviars, les pauvres misérables qui continuent de mendier la bouillie, les chefs et les sujets, les décideurs et les suiveurs… Bref, c’est un décor qui va plus loin que de la cocasse « nègrerie ». Il botte les fesses au monde entier et nous met face à des réalités que nous ignorons, ou que nous refusons sans gêne : ces poignets de mains hypocrites que l’indépendance oblige le Noir à donner au Blanc, et vice-versa, ces petits secrets de couloirs qui signifient « gare à toi mon Général ! », ces richesses foudroyées, ces peuples irrités et cette indépendance truquée !!!

Car 50 ans après l’indépendance, après avoir bu de grands verres de ces champagnes frelatés, dansé bruyamment de jour comme de nuit sans la moindre pause, après avoir acclamé la France et les décideurs, et même nos « Rois » obstinés, l’Afrique (francophone) est malade. Les larmes sont vives. On range qui nous dérange. On tue par l’épée qui nous défie. On coure poser des fleurs sur les stèles des victimes. Et on s’habitue à construire des statues pour ceux qui ont ordonné la guerre, et de petits caveaux pour ceux qui l’ont fait. Peu importe où l’on se situe, les « Chroniques » de Venance sont l’ombre de nous-mêmes. Des flashs originaux qui content avec farce à quel point nos « amis » de l’Occident rient notre destin et combien nos dirigeants n’ont de respect que pour leur petit fauteuil !

 

Comment rester et ne plus bouger ? Avec qui collaborer pour continuer à écrire l’histoire avec Hollande le Boss ? Tel est le tableau sombre que nous décrit l’auteur avec un humour graduel, fantastique et consommé. Et il y va sans oublier la saga des petits-enfants, ces « fistons » qui succèdent désormais à leurs pères, et tous ces jeunes « à l’élan patriotique irritant ». Hier, « Gbagbo [était] Dieu, Blé Goudé le prophète, et la France le diable ». Aujourd’hui, comme la roue qui tourne, « Dieu c’est la France, Ouattara son prophète, et la CPI (Cour Pénale Internationale) le diable qui maintient encore ces gens ! »

 

Et oui, Venance est fécond. Et son humour est tragiquement beau. Et il est encore plus beau quand, de l’édition de FAVRE à celle de FRAT-MAT, bien que d’une édition à une autre, l’auteur a bien le droit de changer certaines parties de son texte, certaines parties du livre sont lavées des bactéries. Blaise devait passer par là ! Sûrement. Et l’auteur l’assume. Sans détour. Voilà pourquoi il restera toujours grand et digne, ce Venance !

 

Manchini Defela

In Le Nouveau Courrier du 05  09  2014



07/09/2014
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